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Vie et mort du cerveau reptilien

L’expression cerveau reptilien est née dans les années 60 et s’est diffusée rapidement, pour avoir une carrière autonome. Rapidement démentie, l’idée est pourtant restée tenace et devint une mystification scientifique. Mais en vain : le neuromarketing adore l’idée ! Suivi par les pro du développement personnel, de la presse. C’est la définition de l’archaïsme de nos instincts les plus profonds. Basic instincts.

En fait, tout message scientifique issu de la production scientifique pure et dure est traduit en langage commun afin d’être transmis, compris ou non. La reformulation apporte une interprétation plus ou moins déviante. La diffusion, ensuite, surtout si elle est réinterprétée par d’autres cerveaux plus ou moins instruits, perd en route des éléments importants, se transforme, se déforme.

Presque, le message pur et dur originel devient totalement indépendant de l’interprétation.

Et c’est tout le problème : un message scientifique erroné pourra être corrigé voir démenti, sans aucun effet repris dans les médias. Il se perd sur la toile, surtout s’il met en contradiction les émetteurs du premier message devenu erroné.

Or, il y a toujours un décalage entre un travail scientifique (2, 3 ans) et la diffusion (2, 3 millisecondes).

La solution réside dans « l’expert » ! Mais la question à se poser est « qui est cet expert au regard de la question traitée » ? Choisir un prix Nobel d’astronomie pour témoigner d’une question de santé publique est … abscon.

OK, j’exagère. Mais si je demande à un spécialiste de cardiologie de parler de santé publique, pensez-vous qu’il soit pertinent ? Certes, il a des neurones pour comprendre une publication de santé publique, mais – justement – il ne l’a pas lue et n’a pas les compétences ni l’expérience pour donner un avis vraiment pertinent.

Or, personne ne le contredira car ce sera le seul médecin d’un plateau TV… ou il sera avec des médecins encore moins compétents qui ne voudraient jamais le contredire et se mettre en danger. C’est ce qu’on nomme « une culture scientifique », très éloigné de « la science ».

Issu de Sébastien Lemerle « Le Cerveau Reptilien, sur la popularité d’une erreur scientifique » CNRS Editions 2022

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