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Pib, taille et évolution de l’humanité

Donnons la place à ces auteurs : Au cours du dernier millénaire, le revenu par habitant dans les pays sélectionnés par cette étude a été multiplié par 32, passant de 717 $ par personne et par année autour de l’an 1000 à 23 086 $ en 2010. Cela contraste fortement avec le millénaire précédent, qui n’a connu quasiment aucune progression.

Les courbes montrent que le PIB a commencé à grimper autour de l’année 1820 et que ce taux d’augmentation constante s’est maintenu au cours des deux derniers siècles. L’un des principaux défis de la théorie de la croissance économique consiste à comprendre cette transition entre stagnation et croissance, et plus spécifiquement d’identifier le(s) principal(aux) facteur(s) qui ont déclenché ce décollage.

Deux faits corroborent l’idée qu’il y a bien eu une stagnation pendant la plus grande partie de l’histoire de l’humanité. Premièrement, les estimations de la longévité calculées sur des groupes spécifiques à travers le temps et l’espace ne montrent guère de variation avant 1700. En 2015, Omar Licandro et moi-même avons ainsi montré, en construisant une base de données répertoriant 300 000 personnes célèbres, qu’il n’y avait pas eu d’évolution de l’âge moyen au décès pendant la majeure partie de l’histoire humaine, confirmant l’existence d’une époque de stagnation malthusienne. En effet, si le niveau de vie avait augmenté régulièrement au cours de l’histoire, on aurait dû observer un accroissement de la longévité humaine, du moins jusqu’à un certain point.

Deuxièmement, la taille humaine calculée à partir des restes de squelettes existants ne montre pas non plus de progression. C’est ce qu’ont découvert la chercheuse en médecine évolutionniste Nikola Koepke et l’économiste Joerg Baten en 2005. La taille d’un adulte dépendant beaucoup de sa nutrition pendant sa jeunesse, cela indique qu’il n’y a pas eu d’amélioration systématique de la nutrition au fil du temps. Il faut attendre le XIXe siècle pour observer une évolution de la taille, comme en témoignent les données soigneusement récoltées par l’armée suédoise à propos de la taille de ses soldats.

Les trois mesures du niveau de vie proposées ici – PIB par habitant, taille et longévité – vont donc dans le même sens : celui d’une stagnation pendant la majeure partie de l’histoire de l’humanité. La croissance économique dont nous bénéficions, avec notamment ses effets positifs sur le niveau de vie mais aussi négatifs sur l’environnement, est donc un phénomène inédit et récent à l’échelle de l’histoire.

Ce billet fait partie d’une série de contributions issues du panel international sur le progrès social, une initiative universitaire internationale réunissant 300 chercheurs et universitaires – toutes sciences sociales et sciences humaines confondues – qui préparent un rapport sur les perspectives de progrès social pour le XXIe siècle. En partenariat avec The Conversation France, ces articles proposent un aperçu exclusif du contenu du rapport et des recherches de ses auteurs.

 

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