Depuis juillet 2021, alors que nous avions sous les yeux, la plus grosse récolte de céréales ever, le prix des matières premières agricoles a commencé à s’envoler. On ne parlait pas encore de guerre en Ukraine !
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La covid n’avait pourtant pas réussi à mettre à mal le système : la production agricole a fonctionné pendant l’épidémie, tout comme l’approvisionnement des marchés, et les citoyens n’ont pas eu à subir de conséquences sur leurs habitudes de consommation.
Mais l’invasion de l’Ukraine par la Russie a bouleversé le paysage en quelques mois : les prix ont explosé, mettant en péril l’approvisionnement des pays pauvres, et contribuant, avec le prix de l’énergie, à relancer l’inflation en Europe.
L’INSEE parle de 31 % sur 12 mois, avec un doublement des prix des céréales et des oléagineux.
Il faut dire que Poutine a dès juillet 2021 a été explicite quant à ses intentions concernant l’Ukraine. Il n’en fallait pas plus pour que les grands acteurs internationaux fassent leur achat à terme et spéculent sur les pénuries à venir.
Non, la hausse des prix des céréales ne s’explique pas par des déséquilibres entre l’offre et la demande sur le marché mondial. Le monde ne manque pas de céréales.
La guerre d’Ukraine a été anticipée non seulement par la Russie et probablement par la Chine qui a augmenté ses stocks, mais aussi et surtout par les quatre grandes firmes multinationales qui contrôlent l’essentiel du commerce des céréales. On les désigne par le sigle ABCD, pour désigner Archer-Daniels-Midland, Bunge, Cargill et Dreyfus. Oxfam estime qu’elles contrôlent de 70 à 90 % du marché international des grains et détiennent des stocks d’importance mondiale et peuvent perturber les marchés de denrées, même si cela met en péril des millions de vies humaines. Ni l’Europe, ni les Etats-Unis ne se donnent les moyens pour empêcher ça.
Même si la bulle se dégonfle après la récolte en cours, elle aura fait des dégâts considérables notamment dans la population la plus fragile. Malgré des récoltes toujours en hausse, le nombre des personnes en état de sous-nutrition continue à augmenter et cela risque d’entraîner des problèmes politiques pouvant mener de nouveau aux émeutes de la faim. Le Sri Lanka en est déjà !
Il y aurait de nombreuses raisons de mettre un peu d’ordre dans tout ça pour ne pas opposer vie humaine et spéculation.